Absence du divin dans l’idole
Motif iconographique
L’image construit la différence entre l’idole et la prière de Tobie, en s’appuyant sur une opposition entre un mouvement qui vient du sol (la colonne s’élève du bas de l’image à droite) et un mouvement qui vient du ciel (la nuée qui surmonte la partie gauche), conjugués avec une opposition entre matérialité et immatérialité.
Ainsi, les nuées constituent une structure fondée sur un module triple dont l’organisation se conjugue au tracé du motif de quadrillage en fond. Dans cette disposition, analogue à certaines parties de l’architecture des églises (baies géminées, ornements végétaux et ouvertures à motifs quadrilobés, notamment), on peut distinguer la construction d’un espace par quelque chose qui est à la fois du domaine du perceptible (la nuée) et de l’invisible (ce qu’elle construit). La nature divine est exprimée par la structure trine ; cette nature n’est pas encore incarnée — d’où l’absence d’image. Elle émane du monde céleste. À l’inverse, la statue vénérée par les Juifs est ancrée dans le monde terrestre. Le second point d’opposition entre les deux scènes se situe ainsi entre matérialité et immatérialité.
La colonne ainsi que la statue sont représentées de façon à accentuer leur matérialité, avec un recours à la feuille d’argent qui confère une préciosité à l’ouvrage. Les Juifs idolâtres ne paraissent pas tant coupables de vénérer un prototype inexistant (l’image est celle d’un animal dont le naturalisme accentue l’aspect terrestre et vulgaire) que de vouer un culte à leur propre œuvre. C’est un des aspects fréquents dans la dénonciation du culte des idoles : plutôt que de se tourner vers Dieu comme le fait Tobie, les hommes se consacrent au culte de ce qu’ils ont eux-mêmes créé.