Corps malade
Motif iconographique
Contrairement au type iconographique, fréquent dans l'art occidental, du malade représenté gisant dans son lit, la représentation du lépreux est ici celle d'une personne active, mais dont on questionne le statut au sein de la société. Les marques sur la peau sont caractéristiques de ce type de maladie et s’inscrivent dans une tradition iconographique bien ancrée au XIVe siècle, qui met l'accent sur les affections dermatologiques les plus spectaculaires, mais aussi les plus fréquentes. La lèpre en fait partie et constitue sans doute l'une des maladies les plus chargées de signification, puisqu'elle est associée à l'hérésie et aux déviances sexuelles dans beaucoup de traités théologiques depuis le début du Moyen Âge. Il s'agit en effet d'une atteinte à la forme, à l'apparence du corps, à son enveloppe extérieure, laquelle passe souvent pour témoin de la qualité d'être d'une personne. La maladie apparaît donc à la fois comme un signe extérieur de péché, un châtiment, mais aussi une incitation à la conversion : à la fois punition et mise à l'épreuve.
Dans le texte qui accompagne cette image, le statut des malades au sein du clergé est remis en question. La maladie les rend-elle incapables d’effectuer les sacrements ? La réponse semble être affirmative : la maladie est un facteur d'exclusion, de perte d'un statut particulier, ici le sacerdoce. La souillure dont leur corps porte la marque rejaillit semble-il sur leur âme et sur leur aptitude à assurer les fonctions du prêtre. Le corps est ici clairement marqué, déformé par le mal, mais toujours actif et capable de se mouvoir. Il est toutefois affecté par une déviation vis à vis de la norme et on ne peut manquer de souligner que le terme de monstre a pu être utilisé pour désigner des malades de la lèpre, chez Gauthier de Coinci notamment (Miracles).