Salut par l’extraction du monde

Thématique iconographique

Poursuivant cette réflexion sur le devenir de l’âme après la mort, l’extraction du monde est étudiée en tant que mode d’expression du salut, en lien avec la Jérusalem céleste.

Le salut acquis par la mort et la résurrection du Christ a non seulement permis la réconciliation de l’Homme et de Dieu, il a également régénéré la Création toute entière. Mais cette régénération du séjour terrestre n’en fait pas l’horizon du salut de l’Homme, ni même de la Création. Le salut définitif de l’Homme s’accomplit dans la vision de Dieu, par une participation à la vie divine dans la Jérusalem céleste. Le monde demeure un lieu passager : l’Homme y reçoit le salut par une participation active au don de Dieu dans l’Église, mais il ne s’agit que d’une étape dont toutes les perfections sont comptées pour rien par rapport à la béatitude promise à ceux qui seront sauvés.

De plus, même si la création est régénérée par le sacrifice vivificateur du Christ, le monde garde une connotation négative qui parcourt notamment l’évangile de Jean : « Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui ; mais parce que vous n’êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait » (Jn 15, 19). On trouve également dans la lettre de saint Jacques : « Adultères que vous êtes ! Ne savez-vous pas que l’amour du monde est inimitié contre Dieu ? Celui donc qui veut être ami du monde se rend ennemi de Dieu » (Jc 4, 4). Le monde passager est donc à la fois un danger pour l’âme et un lieu dont le fidèle est appelé à se distancier, voire à s’extraire.

L’exemple est donné par le Christ lui-même qui s’élève vers son Père définitivement dans l’Ascension, et qui avait été annoncé dans ce mystère par les enlèvements mystérieux de l’Ancien Testament, ceux des prophètes Énoch et Élie. Dans sa Passion et son élévation, le Christ est imité par les martyres qui ne comptent pour rien les souffrances dans la perspective de rejoindre le ciel. Le renoncement ascétique au monde est caractéristique de la démarche monastique : il est comme une anticipation de la vie éternelle par le renoncement à tout ce qui n’est pas Dieu sur la terre. L’assistance que Dieu offre à ses fidèles face au monde est illustrée dans les miracles des vies de saints, et donne autant d’annonces de la libération définitive à venir dans le paradis. L’extraction du monde ne représente pas forcément la lutte entre le bien que serait la vie éternelle et le mal que serait le monde et son prince, le démon (Jn 12, 31 ; 14, 30). Elle passe aussi par le renoncement à des biens terrestres en vue d’un bien supérieur, qui est l’entrée dans la Jérusalem céleste. Les anges en sont les gardiens, ils sont également proches de tous ceux qui sont fidèles au Christ. Au moment de la mort, ces esprits psychopompes accompagnent l’âme du fidèle défunt extraite du monde vers le paradis.


Rédaction

Louise-Élisabeth Queyrel (avec la participation de Pierre-Marie Sallé) / Direction scientifique : Sébastien Biay, Isabelle Marchesin


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Louise-Élisabeth Queyrel (avec la participation de Pierre-Marie Sallé) / Direction scientifique : Sébastien Biay, Isabelle Marchesin, « Salut par l’extraction du monde » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 20 avril 2024, https://omci.inha.fr/s/ocmi/item/46