L’altération de la terre par le Mal

Motif iconographique

Le panneau du Péché originel montre trois arbres : à droite, l’Arbre de la connaissance du bien et du mal portant les pommes et le serpent, au centre l’Arbre de vie, et à droite un nouvel arbre de vie dans les branches duquel se tient une figure démoniaque, qui évoque la vitalité purement animale conséquente au péché. Le panneau se lit donc de la droite vers la gauche, Ève, à droite, tendant à Adam la pomme qu’elle a prise de la gueule du serpent dont elle imite la torsion perfide.

Les effets du péché sont représentés comme un empoisonnement de la matière. Le corps du serpent est piqueté de coups de poinçon – une attaque, au sens propre, de la matière qu’est le bronze. On retrouve ces coups de poinçon au pied de l’arbre portant le serpent, mais aussi sur le socle du jardin paradisiaque figuré au centre du panneau ; ils réapparaîtront régulièrement dans les sols de la porte pour évoquer le Mal, avant que le sang-eau purificateur du Christ ne les fasse disparaître. La partie inférieure de l’arbre de la connaissance du bien et du mal montre les effets du poison sur le vivant. La partie du tronc placée sous le serpent est tavelée, couverte de feuilles desséchées, et les mottes de terre à sa base sont craquelées.

Toutefois, entre ce tronc et les pieds d’Ève apparaissent, gravés dans le bronze, visibles pour qui sait le voir, des monticules herbeux dont jaillissent trois brins : ils ne renferment ni coups de poinçon, ni signe de dessèchement ; au contraire, ils annoncent le territoire sacré dont naîtra le Sauveur. On en retrouve le modèle sur le sol où se tient la Vierge de l’Annonciation, dans le premier panneau du vantail droit qui ouvre l’histoire du Salut. Inscrit au cœur du Paradis terrestre défiguré par le poison du mal, ce verdissement de la terre montre la possibilité d’une réparation, d’une revitalisation, l’espérance d’un Salut porté par un nouvel Adam. Ce Salut est acté par le panneau de la Crucifixion, placé à l’horizontale du panneau du Péché originel sur le vantail droit : la croix vient s’y substituer à l’arbre de vie central devant lequel Ève tient sa pomme au panneau 3, et elle restaure l’Arbre de vie originel de l’humanité, faisant de l’Église un nouveau Paradis terrestre purifié et parfait, un lieu d’attente de la Résurrection universelle.


Rédaction

Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud, « L’altération de la terre par le Mal » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 02 décembre 2024, https://omci.inha.fr/s/ocmi/item/1204