La croix signe agissant du Christ dans la communauté

Motif iconographique

Bernward, grande figure d’évêque nimbé placée au centre de l’image, se tient dans la nef d’une église, l’abbatiale Saint-Michel d’Hildesheim dont il est le fondateur. Les six moines des médaillons latéraux figurent la communauté monastique associée à l’église, dont Bernward est érigé en protecteur, puisqu’il vit encore parmi eux. Dans le pignon de la toiture, un moine nommé Gevehard est vêtu comme un prêtre et assure la continuité liturgique établie par Bernward.

Sur la gauche, un ange sortant des nuées remet une croix à Bernward, qui le regarde. La vision de Bernward garantit sa qualité de saint et de médiateur. Dans le même temps, la croix est vraisemblablement la citation du fragment de la « Vraie croix » que Bernward avait reçu de l’empereur Otton III avant de la remettre au monastère.

Les phylactères et leurs positions respectives explicitent le pouvoir de cette croix, à la fois relique et signe. Sur le phylactère placé sous la croix, il est inscrit : « Hoc (con)tra signu(m) nullu(m) stet p(er)ic(u)l(u)m » / « aucun danger ne subsiste devant ce signe ». On soulignera que ce phylactère n’est pas tenu par le saint, mais qu’il habille, pourrait-on dire, le bras qui reçoit la croix, à la manière d’une étole d’officiant. C’est de cet ornement sacerdotal, qui dans la liturgie chrétienne est lui-même garni de croix, qui s’exprime à travers la formule du phylactère, quand bien même le texte semble inspiré du verset d’un hymne connu. Le phylactère tenu par la main droite de Bernward est la réponse à une supplique qui lui est adressée tout en bas, par le moine prosterné dont le nom est inscrit dans le cadre et qui lui saisit le pied « Souviens-toi de ta congrégation » (Ps. 73, 2). Bernward déploie alors le phylactère qu’il tient vers le haut de l’image, verse le prêtre du pignon : « Bénis, Seigneur, ta maison », ce qui est un verset du rituel de dédicace d’une église.

En synthèse, la croix protectrice est transmise à Bernward, saint et prêtre, qui la porte à l’intérieur de l’église de Saint-Michel, et dont l’action comme signe de présence divine est renouvelée par la perpétuation liturgique qui recouvre l’ensemble de l’édifice, du plus bas au plus haut. Bernward transmet le pouvoir de la croix à l’ensemble de la communauté, où les prêtres successifs assurent les conditions de la perpétuation de l’action.


Rédaction

Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud, « La croix signe agissant du Christ dans la communauté » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 21 novembre 2024, https://omci.inha.fr/s/ocmi/item/1186