Temps sanctifié
Motif iconographique
Cette page met en œuvre toutes les déclinaisons de l’ordonnancement du temps par les chrétiens. Les phénomènes du temps cosmique sont ainsi intégrés de manière à créer une continuité entre la cyclicité de l’année liturgique et celle du passage des mois et des saisons, tout en englobant la linéarité du temps orienté vers l’accomplissement du plan divin. Ces différents plans sont manifestés par la juxtaposition de Paul, qui, figuré en train de lire une de ses épîtres, fait pendant à la figure de la Balance, tandis qu’en bas de la page un apôtre prononce un verset du credo, accompagné d’un prophète censé avoir annoncé ce verset. Chaque prophète donne à l’apôtre qui lui est associé une pierre de la synagogue, détruite progressivement pour donner lieu à l’édification de l’Église. Ainsi le passage du temps est marqué, l’effacement du temps de l’Ancien Testament laisse place à la venue de l’éternité d’après le Jugement : la cyclicité se conjugue à un cheminement orienté par l’Église. Les jours du mois sont hiérarchisés en fonction des fêtes auxquels ils sont consacrés, par un système bicolore qui en témoigne l’importance relative, tandis que dans les colonnes de gauche sont indiqué leur position dans la semaine, dont le décompte a pour premier terme l’office dominical, et leur place dans les cycles du soleil et de la lune, nécessaires pour le calcul de la date de Pâques. Ce « temps sacré » décrit par Le Goff se décline ainsi à l’échelle hebdomadaire, mensuelle, annuelle et dans la continuité de l’histoire universelle de l’Église ; chaque moment du temps de la Création est ainsi subsumé dans un temps christianisé, procédé qui se poursuit dans le reste du manuscrit où ce sont les heures de la journée qui sont décomptées afin d’être consacrées à différentes prières. C’est, de la sorte, le temps de Dieu qui devient manifeste dans le temps humain.