L'eau lumière
Motif iconographique
Les propriétés du cristal de roche, qui appartient à la famille des quartz, lui ont très tôt conféré un statut particulier dans la riche gemmologie symbolique des Chrétiens : très dur et transparent à la lumière, souvent associé à de la glace, c’est-à-dire à un liquide solide, les commentateurs en font des métaphores de la nature angélique, de l’incarnation du Christ ou encore du baptême purificateur du péché, des thèmes que l’on trouve généralement associées aux intailles carolingiennes ; il sera également utilisé comme contenant de reliques que l’on peut voir en transparence.
Depuis l’Antiquité, on considère que le cristal de roche est de l’eau si fortement congelée qu’elle ne peut retourner à son état liquide. On ne peut comprendre l’importance du cristal de roche dans l’art chrétien sans la convergence de ces deux substances que sont l’eau et la lumière, un mélange qui est cité à deux reprises dans la Bible : en Ezéchiel 1, 22, au-dessus des Quatre Vivants dont le christianisme fera une préfiguration des Quatre Evangélistes, se tient un « firmament éclatant comme le cristal », que l’on retrouve dans la première grande vision des 24 Vieillards et des Quatre Animalia entourant l’Agneau, dans l’Apocalypse de saint Jean : « devant le trône de l’Agneau, on dirait une mer de verre, claire comme le cristal (mare vitreum simile crystallo) » (Ap 4, 6). Cette pureté de l’eau - rivière de vie, et cette solidité qui contredit l’impermanence de la matière du monde s’accompagnent d’une brillance, qui est celle de la gloire de la Résurrection. De façon plus générale, l’emploi généralisé des gemmes dans l’art chrétien, le plus souvent non gravées d’images, est à mettre au crédit de ce double mécanisme de pérennité et de pureté lumineuse, qui les fait appartenir au monde céleste et leur confère des propriétés prophylactiques, dont la médecine se fera aussi l’écho.