Lumière comme agent dynamique

Thématique iconographique

La lumière (lumen) est une substance en mouvement. Ce mouvement, quantifiable et prévisible, est soumis à des lois. Ces lois ne purent être véritablement établies sur un plan mathématique, avant le développement de l’optique géométrique lié à l’apport des scientifiques arabes au XIIIe siècle (Grosseteste, Bacon, Witelo, Peckam). Il n’en demeure pas moins que l’approche empirique des effets lumineux avait déjà été élaborée, depuis l’Antiquité, en système organisé de la Vision dont les artistes et les architectes médiévaux maîtrisaient les ressorts.

Dans le cadre de son émission, la lumière conserve toujours un lien avec sa source : si la source (lux) se modifie ou disparaît, la lumière se modifie ou disparaît à la mesure de sa source. Ce lien irréductible entre lux et lumen donne à la lumière une continuité spatiale. Elle transcende les distances et permet, par volonté divine, d'annuler l’hétérogénéité radicale entre la sphère divine et la sphère terrestre. Dans les images, la lumière est ainsi le principal vecteur qui permet de montrer que l’information spirituelle descend sur la terre (La lumière vectrice de vérité). C’est sur ce même modèle de délocalisation sans perte de lien avec l’origine que se développe l’iconographie de l’insufflation des âmes rationnelles dans le corps, tout comme celle de la remontée des âmes individuelles vers le ciel (La lumière vectrice des âmes rationnelles).

Si la lumière divine est un agent dynamique entre ciel et terre, elle a aussi la capacité à attirer à elle ; c’est même là sa principale fonction dans l’économie globale du christianisme. Dans les représentations figurées, ce principe d’attraction est rendu manifeste de plusieurs façons. Il peut reposer sur les couleurs et sur leur capacité à structurer l’espace (Infusion et attraction de la lumière divine). Il peut aussi relever des propriétés géométriques de la lumière qui permettent de rationaliser l’espace et de jouer, alors, sur les perspectives, les lignes de force qui guident vers le divin (La mise en espace du sacré par la lumière). La faculté qu'à la lumière divine à faire tourner l'humain vers Dieu (la conversion) est également comprise comme la gradation d’une intelligence progressive du divin, qui va de la perception sensible de la lumière à son intelligence véritable (La progression dans la lumière comme chemin d’intelligence). Mais plus encore, la lumière a la capacité à transformer la matière lorsqu’elle la rencontre ou la pénètre. Et l’on soulignera que nombre des déclinaisons esthétiques de la lumière (voir Lumière comme principe esthétique) dérivent en fait d’une faculté qui est, et de façon paradigmatique, d’abord à l’œuvre dans l’humain lui-même lorsqu’elle le transforme en temple de Dieu : la lumière spiritualise les corps (La spiritualisation des corps par la lumière).


Rédaction

Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Isabelle Marchesin / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud, « Lumière comme agent dynamique » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 01 mai 2024, https://omci.inha.fr/s/ocmi/item/955