Vision performative
Thématique iconographique
Les processus sensoriels et cognitifs qu’elle mobilise font de l’expérience visionnaire un phénomène actif, qui a des effets sur celui qui la vit. Elle induit des transformations de nature variée, ce qui lui confère une qualité performative.
La vision béatifique promise aux fidèles après leur mort constitue une forme paroxystique de la vision de la vérité divine. Les vivants ne peuvent qu’imparfaitement l’anticiper mais les mystiques de la fin du Moyen Âge se sont interrogés sur le chemin qui pourrait l’approcher dans la vie terrestre. Aux XIIIe et XIVe siècles, Henri de Gand et Duns Scot la pensent en termes d’impression intérieure et d’abstraction. Les bienheureux seuls ont une vision immédiate, tandis que les théologiens l’atteignent de manière imparfaite car médiatisée. La mystique spéculative, à partir du XIVe siècle, introduit l’idée d’une union affective à Dieu qui exclut une ascension intellectuelle au profit du désir de Dieu par l’amour, dans la lignée de Denys le Pseudo-Aréopagite.
C’est également dans le corps du fidèle que peut s’opérer la mutation, assimilée à un acte d’amour véritable du Christ allant jusqu’à entraîner la conformation du corps du croyant à celui de Jésus, notamment par la stigmatisation, dont les premiers exemples apparaissent au XIIIe siècle, et dont François d’Assise et Catherine de Sienne constituent les cas les plus illustres. Cette transformation peut également être le fruit d’exercices spirituels et de pratiques ascétiques, qui s’appuient dans certains cas sur la médiation des saints. La participation mentale au martyre du Christ entraîne une purification de l’âme qui transparaît dans la représentation des corps.