Médiation christique comme mise en relation

Thématique iconographique

La notion de médiation contient la notion de liaison : pour qu’opère une médiation entre le ciel et la terre, il est nécessaire que des objets et/ou des personnes mettent en relation ces deux sphères aussi étrangères topographiquement qu’elles le sont par la substance (voir Espace comme distance).

L’Église, à considérer comme une communauté humaine, est qualifiée d’Épouse et de Corps du Christ en ce qu’elle est unie à Dieu, de même que les chrétiens sont unifiés en elle dans le corps christique. Elle est la première et la plus importante des mises en relation de Dieu et des hommes (l’Alliance). Depuis la distinction augustinienne entre les deux Cités (saint Augustin, La Cité de Dieu), cette Église terrestre est un groupe humain spirituel pérégrinant historiquement au-dessus du monde tout en étant lié à lui. Selon les époques et les nécessités historiques, l’Église est considérée comme subsumation de la Synagogue, figure maternelle mariale, Église militante ou encore pénitente. Dans le même temps, et il s’agit d’un concept central dans le christianisme médiéval, l’Église est aussi une communauté céleste. Bien avant que, « Jérusalem céleste » de l’Apocalypse, elle ne monte tout entière vers Dieu, elle existe aussi comme communauté spirituelle placée hors du temps, renfermant aussi bien les fidèles en chemin vers le Salut que les élus qui sont déjà morts et unis à Dieu au ciel. Cette « Communion des saints », ce corps christique constitué à la fois sur terre et au ciel par la présence de l’Esprit saint (1 Cor 12), participe ainsi aux deux mondes (L’Église des saints).

La présence au sein d’une même communauté spirituelle de croyants sur terre et d’élus se tenant déjà auprès du Père assure à tous les fidèles le secours et l’appui de ceux qui sont déjà sauvés : la Communion des saints garantit l’effectivité de l’intercession, d’autant que les élus, que leur vie exemplaire à conduit aux côtés de Dieu, sont dans une intimité au divin qui est inatteignable pour les croyants encore sur terre (ou bien bloqués au Purgatoire, lieu de l’au-delà transitoire fixé au XIIIe siècle). L’intercession des saints, interlocuteurs privilégiés de Dieu, occupe donc une place centrale dans la dévotion médiévale et dans le développement du monachisme occidental (Intercession des saints).

En utilisant les restes physiques ou les objets qui ont été au contact de ces saints – les reliques –, le christianisme médiéval organise le maillage sacré d’un territoire qui est, de fait, étranger au récit biblique. Ces reliques de saints font liaison entre Dieu et les hommes. Supports matériels de la virtus du saint, c’est-à-dire de la puissance attachée à sa sainteté, elles investissent les autels des églises, donnent lieu à des pratiques de pèlerinage, et constituent les vecteurs privilégiés de la relation entre le ciel et la terre.  Les fidèles peuvent s’appuyer sur elles pour demander l’intercession du saint dont elles proviennent et, inversement, il est courant dans les récits miraculeux médiévaux que les reliques agissent d’elles-mêmes comme une manifestation médiée de la volonté divine (Vectorialité des reliques).

La Vierge occupe une place tout à fait privilégiée dans la Communion des saints, et son importance est croissante au cours du Moyen Âge. En tant que mère du Christ, elle est considérée comme la première médiatrice de la grâce, celle par qui le salut est rendu possible (Vierge médiatrice de la grâce). Interlocutrice privilégiée du Christ, la Vierge est aussi la première intercessrice des fidèles auprès du Christ (Vierge intercessrice). La dévotion à la Vierge et sa place dans la théologie s’intensifient autour des XIIe et XIIIe siècles notamment sous l’influence de l’ordre bénédictin puis des ordres mendiants (dominicains et franciscains).  Le développement de son culte se traduit par l’apparition et la fixation de la prière du Rosaire, récitation répétée à l’aide d’un chapelet de la prière de l’Ave Maria, et par son omniprésence dans la lyrique, les Livres d’Heures et, de façon plus générale, dans l’art chrétien de la fin du Moyen Âge.

Si la relique est une matérialité médiatrice de virtus et donc de présence divine, la liaison entre Dieu et les hommes peut aussi être opérée par le biais d’objets, et plus particulièrement d’images, qui ne sont pas sacrées en soi, au risque de l’idolâtrie, mais qui, dans un contexte sacré, peuvent être activées par Dieu et devenir le réceptacle de la présence divine par l’entremise d’un miracle (Image miraculeuse).


Rédaction

Mecthilde Airiau / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud


Pour citer la page

Collectif OMCI-INHA, Mecthilde Airiau / Direction scientifique : Isabelle Marchesin, Mathieu Beaud, « Médiation christique comme mise en relation » in Ontologie du christianisme médiéval en images, consulté le 01 mai 2024, https://omci.inha.fr/s/ocmi/item/1144