Entrée dans la loi de la Nature
Motif iconographique
Adam, dans la partie gauche de l’image, travaille la terre, conformément à la punition divine, une tâche dont la pénibilité est visible dans son corps amaigri. De l’autre côté du panneau, Eve allaite un nouveau-né ; le réalisme de la scène, l’attention portée aux corps et à leur vêtement, mettent en avant la dimension charnelle de la sanction de Dieu et la complémentarité des activités nourricières de l’homme et de la femme. La condition dégradée entraînée par le péché est également sensible dans la représentation des arbres du panneau : contrairement à la végétation paradisiaque des scènes précédant cet épisode, ils ont ici perdu de leur matière et de leur structure.
La possibilité de la vie est néanmoins présente en germe dans l’arbre situé au pied d’Adam, placé dans un sol fertile et arrosé ; mais cette vie dépend du travail de l’homme, nécessaire à sa subsistance. Pour garantir le maintien du principe de vie, Adam doit avoir connaissance des lois qui régissent le monde terrestre, lois selon lesquelles la subsistance résulte d’une lutte pour la vie, et que l’ange debout sur le disque à tête de lion vient lui transmettre. Ce disque, par sa forme circulaire, peut être vu comme une forme de la roue qui tourne, figure du mouvement des sphères célestes et du temps qui passe dans la culture médiévale. Le flottement des vêtements de l’ange, ses ailes repoussées en arrière, traduisent l’animation du souffle cosmique qui parcourt le monde et vient insuffler la vie dans la création. Cette animation de la figure de l’ange en fait le moteur du mouvement qui anime le monde, dans la nouvelle configuration du temps où Adam et Eve sont entrés, qui porte les prémisses du renouveau de la création et de l’humanité. Le passage du paradis à la cosmologie terrestre ouvre en effet le temps du salut, annoncé ici par Eve, qui préfigure Marie.