Réforme individuelle
Motif iconographique
Les deux roues présentent en contrepoint deux manières de faire usage du temps imparti à chacun. Ce temps, bien que figuré par un cercle, a néanmoins un début et une fin : il s’agit d’un temps orienté, linéaire, borné par les limites de la vie humaine, de la naissance à la mort. Les deux roues sont mises en mouvement par la Fortune, dont la personnification occupe le centre de l’image. Le cycle du cercle extérieur s’inscrit dans la continuité des figurations traditionnelles de la Roue de la fortune. Il commence en bas à gauche, et figure le progrès de l’homme dans le monde matériel : les honneurs accompagnent la croissance du personnage, dont la bonne fortune culmine en haut de la roue où trône une figure couronnée. Mais ce succès est transitoire, et laisse place à une chute où la perte des honneurs est conjointe à la décrépitude du corps, dont le point d’orgue est la mort représentée dans le médaillon le plus bas, juxtaposé au médaillon dans lequel deux diables s’emparent de Théophile, une correspondance qui semble induire la sanction d’une vie non tournée vers Dieu.
Le cycle de Théophile est orienté par l’accomplissement du salut de son protagoniste ; il commence en haut à droite, dans un mouvement de chute causé par son rejet de l’Église, et dont le nadir est la conclusion du pacte avec le diable, que suivent la repentance et le retour à la foi chrétienne. La mort de Théophile est le point culminant de ce cycle secondaire : grâce à sa conversion, opérée par l’intercession de la Vierge, il parvient à se rapprocher de Dieu, ce que peut suggérer la juxtaposition du médaillon où les funérailles de Théophile sont représentées, au-dessous de la figure couronnée pouvant évoquer un Christ en gloire. L’orientation du temps de la vie vers un terme inéluctable n’empêche donc pas l’individu de choisir la manière dont il le met à profit, soit en demeurant dans l’illusion des biens terrestres, soit en consacrant son existence à Dieu.